L’origine du tressage de la vigne reste floue dans le vignoble français. Pourtant, les viticulteurs bio champenois se l’approprient de plus en plus. Dans ce cadre, une initiation à cette pratique alternative au rognage a eu lieu chez Alexandre LAMBLOT, viticulteur bio depuis 2019 à JANVRY (51). Il a en effet expérimenté et créé sa propre technique de tressage, et a partagé ce savoir-faire à une dizaine de curieux, qui sont repartis en promettant de tenter l’expérience à leur tour.
Le tressage, quand et comment ?
Idéalement, le tressage doit se faire au même moment qu’au palissage : on palisse en montant la parcelle, et on tresse en redescendant, etc.
Pour tresser, on réalise un « pont » par cep, puis on y insère les autres brins à la manière d’une tresse, en alternant le sens d’insertion du brin.
Pour ce faire, prendre les deux derniers brins d’un cep, et les nouer entre eux. En revenant vers le pied du cep, prendre chaque brin et le passer dans le pont réalisé en alternant le sens de passage du brin. Cela permet de rendre le tressage plus solide et plus équilibré.
Les ponts doivent se situer de 10 à 20 cm au-dessus du fil palisseur. Au-delà ils gêneront le passage du tracteur.
Les apex des brins tressés doivent le plus possible être orienté à l’horizontale voire vers le dessus de la végétation. S’ils sont orientés vers le bas, la croissance va s’accumuler au niveau de la tresse et créer une zone humide et propice aux maladies.
Si les brins sont trop éloignés du pont, on peut croiser deux nouveaux brins pour faire un second pont et continuer le tressage sur ce pont.
Une fois les brins aoutés, un passage à la cisaille peut être fait sur les faces afin de faciliter le travail des coupeurs à la vendange.
Est-ce contraignant ?
Une fois maîtrisée, la technique est facile à mettre en place. Le tressage demande à peu près le même temps que le palissage, on double donc le temps de travail à la parcelle en période de palissage, ce qui peut demander plus de main d’œuvre. Cependant, ce temps supplémentaire, concentré sur une seule période se compense avec le gain de temps du rognage et de l’écimage.
Cette technique n’a pas de conséquences sur la taille. Le prétaillage est toujours possible puisque les brins ne sont pas noués aux fils.
Et le risque mildiou ? Alexandre LAMBLOT témoigne que le tressage n’augmente pas la pression mildiou. Si du mildiou mosaïque peut d’implanter dans la zone de la tresse, il ne retombe pas sur les grappes. En 2021, il n’a pas pu tresser l’ensemble de ses parcelles, mais a constaté qu’une partie d’une parcelle avec un tressage précoce se sont mieux comportées face au mildiou que la partie rognée…
Quels avantages au tressage ?
Les avantages de cette pratique sont nombreux.
A la vigne, on voit qu’au bout de 2 années de tressage, les entre-cœurs ne se développent plus. En effet, les apex principaux ne sont plus rognés et la croissance végétative se poursuit donc de façon linéaire vers le bourgeon principal. Sans rognage, la vigne s’épuise ainsi moins à produire des brins secondaires et des verjus. Les années chaudes cette technique permet de faire de l’ombre aux raisins et évite l’échaudage.
Alexandre LAMBLOT constate également que la véraison de ses grappes arrive plus tôt, ce qu’il explique par le fait que la vigne peut se concentrer sur sa partie fructifère plutôt que sur la repousse de bourgeons auxiliaires en réponse aux rognages. Selon lui, le tressage permet de pouvoir aller plus loin dans la maturité des raisins, et permet de conserver de l’acidité et de la fraîcheur, ce qui garantit un bel équilibre.
En effet, le tressage se fait également ressentir à la dégustation. Pour Alexandre LAMBLOT, la qualité gustative est supérieure pour des vignes tressées. Bonus de qualité si elles ont également été taillées tardivement : « j’ai réalisé plusieurs modalités sur une parcelle afin de tester l’influence de la taille précoce (novembre), ou tardive (mars) et du tressage et du rognage sur la qualité de mes vins. A l’aveugle et pour chaque dégustateur, c’est toujours la modalité « taille tardive et tressage » qui goute le mieux. »
Moins interventionniste, écologique et économique, cette technique est particulièrement adaptée à des saisons sèches comme 2022. Pourquoi ne pas tenter l’expérience ?