Développer les médecines alternatives dans les élevages biologiques ruminants de la région Grand Est

Développer les médecines alternatives dans les élevages biologiques ruminants de la région Grand Est
Développer les médecines alternatives dans les élevages biologiques ruminants de la région Grand Est

Au cours du mois de mars 2022, un sondage a été envoyé aux éleveurs biologiques de la région avec pour cible les fermes ayant des ateliers de production de ruminants. La thématique abordée portait sur les médecines alternatives et leur utilisation.

Principaux objectifs :

  • Caractériser le niveau d’intérêt et de connaissance des éleveurs envers les pratiques alternatives
  • Quantifier la proportion d’utilisation au sein des élevages
  • Mettre en lumière les évolutions souhaitées vis-à-vis de leur utilisation
  • Souligner les principaux besoins des éleveurs à leur propos

Le but était donc de faire un rapide état des lieux de l’utilisation des médecines alternatives au sein des élevages ruminants biologiques ou en conversion de la région Grand Est.
Sur un effectif de 1060 éleveurs ruminants ayant été contactés, 135 éleveurs nous ont répondus, avec la répartition ci-contre dans les départements de la région (soit près de 12.7% de répondants) :

Principaux résultats :

  • Constat d’une utilisation répandue des médecines alternatives même si certains éleveurs restent réfractaires à leur mise en place.
  • Les principaux freins à leur recours constituent : des problèmes de temps en lien avec la logistique, le temps d’apprentissage ou encore le suivi et l’accompagnement. Les éleveurs soulignent aussi un manque de connaissances liés à ces pratiques ou encore la peur des pertes durant la période d’apprentissage avant l’atteinte d’un certain équilibre du système avec une bonne intégration de ces médecines dans le fonctionnement global de la ferme.
  • Des différences dans les médecines alternatives utilisées : les plus utilisées constituent l’aromathérapie, la phytothérapie et l’homéopathie suivies par l’ostéopathie et l’acupuncture.

 

Principales pathologies des élevages sondés (avec des degrés de précision variables, par organe et appareil touché) Nombre d’élevages touchés
Pathologie du système reproducteur/de gestation (métrite, salpingite, rétention placentaire, omphalite, toxémie de gestation ou hypocalcémie et plus spécifiquement sur le système mammaire : mammite et taux de cellule) 61
Pathologie du tractus digestif (strongylose, coccidiose, douve, paratuberculose, cryptosporidiose, diarrhée) 42
Pathologie de l’appareil locomoteur (arthrite, arthrose, panaris, fourbure, dermatite digitée, onglons, symptômes de boiterie) 38
Pathologie de la peau (dermatose, myase, ecthyma, galle, poux, abcès, plaie) 18
Pathologie du système respiratoire (pneumonie, bronchite vermineuse, grippe, toux) 11
Pathologies non précises et non associables à une zone en particulier (carence, stress) ou pathologies touchant le système entier (CAEV) 4
Pathologie du système circulatoire (septicémie) 1

 

Pathologies traitées par les médecines alternatives
(*couleurs en fonction des zones touchées du système)
Aromathérapie Phytothérapie Homéopathie Ostéopathie Acupuncture
Mouche, boiterie, diarrhée, problèmes digestifs : gastro, bronchite et autres problèmes respiratoires, mammites, problème de délivrance Parasitisme (interne) : douve, strongle…, coccidiose, fourbure, préparation à la mise-bas, gros cordon, pour l’immunité (général) Arthrite, stress, tarissement, suite mise-bas Boiterie, mise-bas difficile Boiterie
  • Témoignage de besoins au niveau de l’apprentissage et du suivi après mise en place de ces médecines. Le principal besoin constitue un besoin d’accompagnement collectif (groupes d’échange) et de formations.

  • Une évolution globalement tournée vers l’utilisation et le développement de ces pratiques.

  • Un environnement de suivi professionnel très limité avec des vétérinaires peu enclins à conseiller les éleveurs sur l’utilisation des médecines alternatives.
  • Une volonté et une motivation à participer à une étude plus poussée sur le sujet.

Les suites

Suite à ce premier questionnaire, nous avons décidé d’étudier plus précisément les points suivants :

  • Le recours aux médecines alternatives dépend de l’environnement notamment professionnel et de suivi agricole : présence d’organismes comme BGE, de vétérinaires impliqués et motivés par les médecines alternatives. Les médecines alternatives témoignent en effet d’un enjeu de connaissances et d’apprentissage (accès à des formations, des conseils). Il y a une certaine recherche d’autonomie et d’indépendance de la part des éleveurs (ne plus dépendre des vétérinaires, de l’industrie pharmaceutique) mais cette envie se heurte à des difficultés à accéder à un environnement adapté qui permette de favoriser cette démarche tournée vers l’utilisation des médecines alternatives.
  • Un système d’élevage faisant appel aux médecines alternatives de manière fréquente possède des caractéristiques particulières au niveau de la conduite, notamment vis-à-vis de son alimentation, du logement, du chargement. L’éleveur a besoin de repenser tout son système pour les intégrer au fonctionnement de la ferme (approche systémique ou globale). (ex : arrêter le traitement systématique et avoir une considération plus individualisée, observation régulière de l’état et du comportement des animaux …). Les éleveurs bio ayant recours aux médecines alternatives laissent une place particulièrement importante aux mesures préventives aussi mises en avant dans le cahier des charges de l’agriculture biologique, intervenant en amont de tout traitement en curatif.

Ces hypothèses ont ainsi été testées dans le cadre d’entretiens semi-directifs durant les mois d’avril et de mai auprès d’éleveurs bio ruminants de la région Grand Est.

Dans la continuité de la démarche initiale de développement des médecines alternatives, nous allons ensuite nous tourner vers les vétérinaires locaux de la région Grand Est, leur présenter les résultats du sondage et des entretiens passés auprès des éleveurs et étudier leur éventuelle motivation à participer et prendre part à l’accompagnement des éleveurs de la région.

Un répertoire de savoir-faire sera aussi rédigé afin de rassembler la manière dont sont utilisées les médecines alternatives par les éleveurs de la région et un document associé sera publié dans les lettres AB au cours des prochains mois.

 

Ce travail entre dans le cadre d’un stage de 6 mois au sein de l’association Bio en Grand Est sur la thématique : « Développer les médecines alternatives en élevages biologiques ruminants ». Il est réalisé par Julie Lefeuvre – julie.lefeuvre@biograndest.org

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