Rapport Moral 2021 de Laurent COUSIN

Rapport Moral 2021 de Laurent COUSIN
Rapport Moral 2021 de Laurent COUSIN

« C’est dans un esprit un peu contrarié que j’aborde ce rapport moral. Comme vous, je pense, personne n’a pu passer à côté des signaux qui ne sont pas bons du côté de la consommation des produits biologiques. Les médias l’ont bien relayé ces derniers temps. On a fait le 13 heures, le 20 heures, la presse agricole, tous les journaux locaux du Grand Est…

Mais qu’a-t-il bien pu se passé d’aussi brutal en 2021 pour inverser une tendance bien ancrée depuis plus de 10 ans? Nous avons connu une progression solide, constante avec une confiance reconnue des consommateurs et puis, patatras !!!

On a toujours dit, il ne faudrait pas un jour un problème sanitaire dans le bio. Y a-t-il eut cela ? NON… Un scandale médiatique ? Non plus…

On a beau tourné et retourné le problème, le bouleversement des habitudes d’achats, des modes de consommation, c’est la nouvelle donne, directement issue de la pandémie sanitaire…

Ça, pour le coup, qui aurait pu le prévoir ? Parce qu’on entend bien la petite musique maintenant :  Fallait-il envoyer autant de producteurs dans le bio ? Les filières sont en surproduction ?

Et puis, il y a maintenant les conséquences de la guerre en Ukraine et cette question centrale de la souveraineté alimentaire. Il faut libérer la production, entend-on. Remettre en culture les jachères…

Personne n’aborde la question du partage des productions agricoles…

Pays riches/pays pauvres… alimentation animale/ ou alimentation pour les populations… terre à vocation énergétique, agrocarburant ou terre vivrière…

Ce débat doit avoir lieu, au même titre que celui sur les volumes de production.

Voilà pour un constat qui ne place pas l’agriculture biologique sous un bon karma en ce début 2022…

Alors quel est notre rôle ? Quelle contribution pouvons-nous apporter à ces débats ?

Je pense que nous devons tous prendre un peu de hauteur et regarder quels sont nos fondamentaux solides… La société, les citoyens nous attendent, nous les agriculteurs, sur les enjeux du climat, de la santé, de la protection de l’environnement, du respect de la biodiversité. Oui, plus que jamais ces enjeux sont importants à leurs yeux, alors démontrons-leur que les paysans bios travaillent en ce sens… On a perdu, je pense, le monopole de la communication sur l’environnement, sur la santé. On voit fleurir un tas de labels entre une agriculture de base que, soi-disant, plus personne ne pratique, et une agriculture biologique qui serait pour une élite, inaccessible.

Nous avons à reconquérir les consommateurs, ce sont eux qui ont la clef du redémarrage, à condition d’avoir un discours de vérité, de pédagogie.

Un légume sans résidu de pesticide, un lait riche en oméga 3, local ou « c’est qui le Patron », un vin HVE, demain une viande ou une farine HVE. Nous devons expliquer que tout ce que vous attendez de votre acte d’achat est réuni sous un seul label, reconnu, contrôlé par une certification fiable, s’appuyant sur un cahier des charges incomparable avec toutes ces pâles copies. Le label AB est le seul qui a tout cela en lui. Il faut que ce soit dit.

Ça va être notre job, le réseau bio, les producteurs, il faut communiquer. L’Agence Bio, également, va nous aider. On demande aussi aux grandes filières, qui perçoivent des cotisations des producteurs bio de bien flécher une communication positive sur le bio.

Enfin les élus sont attendus, à tous niveaux, national avec une nouvelle PAC qui rate encore son rendez-vous avec la transition agricole, les élus de terrains avec l’application de la loi EGALIM et l’introduction des 20% de bio dans la restauration hors domicile, et avec les compétences qui sont les vôtres aujourd’hui sur l’agriculture, sur l’alimentation.

Tous les leviers pour redynamiser la demande n’ont pas encore été activés, là où il y a la volonté, la transition agricole pourra s’opérer et les filières rechercheront à nouveau des producteurs.

A ne plus convertir, on prépare inévitablement un manque de producteurs bio dans les années à venir. Il y a une inertie énorme quand on stoppe les conversions avec ce fameux délai de conversion. Aujourd’hui encore, des nouveaux volumes arrivent sur les marchés.

Il y aura la même inertie dans le sens inverse, quand la consommation repartira, il faudra attendre 2 ans pour avoir les nouveaux volumes et on dira que l’on n’a pas assez de production bio…

Voilà pourquoi, je veux placer cette AG dans un esprit combatif. Il n’y a que nous qui pouvons tenir ce discours positif aujourd’hui. Tout le monde s’est laissé porter par la dynamique des filières pendant la décennie passée. C’est bien dans une période de turbulences que doivent se révéler aujourd’hui qui sont les acteurs motivés.

Ok pour temporiser le développement du bio, mais on sera là pour réveiller tout ça, je l’espère au plus vite. »

Laurent COUSIN, Président de Bio en Grand Est

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